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Premier test en haute altitude pour le Starship

Nous venons de vivre un moment historique. Je n’ai pas envie de me mettre à commenter régulièrement l’actualité sur ce blog (beaucoup de monde le fait déjà très bien), et c’est un petit peu “hors série” par rapport aux sujets habituels, mais comme il n’y a pas eu d’articles ici depuis longtemps, j’ai décidé de recopier cet article que j’ai écrit pour le site de l’Association Planète Mars 😅

Promis, on retourne bientôt sur la Lune. Mais peut-être que le Starship n’y sera pas pour rien si notre avenir devient multi-planétaire… 😉 On peut faire plein de choses très chouettes avec d’autres lanceurs, mais pour le moment c’est le seul véhicule qui a l’ambition (en coût par kilo et en quantité de masse en orbite par an) de rendre possible mes vieux jours sur un autre corps céleste, à accomplir quelque chose de grand pour les générations futures, et une gravité réduite pour ménager mes articulations.


Mercredi dernier, SpaceX a testé pour la première fois son Starship lors d’un essai de vol en haute altitude (12.5km). Le replay officiel est disponible sur leur chaîne YouTube (toutes les images de cet article sont des miniatures tirées de cette vidéo).

Bien que cet essai ait terminé en feu d’artifice 💥, cela a été l’occasion pour SpaceX de collecter de nombreuses données, et de valider par l’expérience des idées audacieuses qui n’existaient que sur papier. Analyse de ce qu’il s’est passé.


T+0.00: Allumage des 3 moteurs Raptor 🦖 et décollage. C’est la première fois que plusieurs moteurs Raptor sont utilisés en même temps lors d’un vol, et pendant plusieurs minutes. Les moteurs avaient déjà été allumés lors de tests au sol 2 semaines auparavant, mais seulement quelques secondes.

3…2…1… Liftoff !

T+1.40: Arrêt moteur n°1, pour réduire la poussée. Des flammes remontent dans la baie moteur, mais rien d’alarmant.

Fire in the hole !

T+3.10: Arrêt moteur n°2, orientation des moteurs pour maintenir la poussée dans un angle stable.

On voit bien sur l’image de gauche que le moteur du n°2 s’arrête, et sur l’image de droite on voit à quel point les traînées des deux moteur sont orientées différemment.

T+3.40: Réduction des gaz du moteur n°3 ↘️. On voit que les flammes sont moins vives, et que le corps du Starship s’oriente légèrement sur le côté. Cette manoeuvre avait pour but de décaler horizontalement le vaisseau, afin qu’il retombe sur un endroit vide en cas de problème, et pour l’éloigner de la cible d’atterrissage (important pour valider les étapes suivantes).

They see me cruisin’, they hatin’

T+4.35: Arrêt moteur n°3 (numéro de série n°42, petit clin d’œil à H2G2 😏), et passage en position horizontale. Une des idées “folles” sur Starship que l’ont attendait de voir en vrai était cette fameuse transition en mode “belly flop” (à plat ventre). Tel un parachutiste, le Starship s’oriente en position horizontale en utilisant ses ailerons et ses “moustaches” pour créer du frottement et ralentir sa chute, guidée vers le site d’atterrissage.

Début de la chute libre…

T+5.00: La position horizontale est stable ! Et le Starship “plane” petit à petit vers le site d’atterrissage. 🎯

Une autre référence à H2G2 vient en tête… 🐳🌺

T+6.25: Ré-allumage de 2 moteurs (3 ne sont pas nécessaires, car il faut réduire la poussée pour atterrir précisément), poussée fortement inclinée pour basculer en position verticale (puis contre-basculer pour compenser la vitesse horizontale et l’inertie). C’était assez irréel de voir cette manœuvre fonctionner avec tant d’agilité, malgré l’imposante taille de l’engin (50 mètres de long, 9 mètres de large… un bâtiment de 15 étages).

Franchement… Il fallait le voir en vrai pour y croire… Quand une fusée est penchée comme ça, normalement, on la détruit, parce que c’est qu’un truc va pas !

T+6.39: C’est à la toute fin seulement qu’une anomalie surgit. Le moteur n°2 s’éteint abruptement, et le n°1 commence à cracher des flammes vertes.

Trop stylé 💚. Dommage que ça signale la mort d’un moteur…

T+6.42: Avec un moteur perdu et un autre en anomalie, la poussée n’est pas suffisante pour ralentir la chute du Starship, qui se pose précisément sur la zone d’atterrissage, mais “un peu” trop vite. Explosion ! 💥

Sur les différentes diffusions amateur suivant l’événement en direct, les américains s’écrient “RUD!” (Rapid Unscheduled Disassembly : Désassemblage rapide et non prévu). Le compteur s’arrête.

On va pas se mentir, c’est pour ça qu’on aime les fusées, non ?

Malgré ce spectacle final, l’euphorie est de mise. Être arrivé si loin dans la procédure de test alors que ce n’était que le premier essai, c’était vraiment bien joué ! Avoir réussi à allumer plusieurs moteurs Raptor pendant si longtemps en vol, contrôler aussi précisément l’orientation des moteurs pour diriger la poussée, basculer en position horizontale et contrôler la chute uniquement à l’aide des ailerons, cibler le site d’atterrissage, ré-allumer les moteurs alors que le vaisseau est en position horizontale, effectuer la manœuvre de basculement pour atterrir à la verticale… Il n’aurait manqué qu’un atterrissage en douceur pour couronner cet exploit, mais pour un premier essai c’est déjà très satisfaisant !

L’équipe de SpaceX s’est d’ailleurs félicitée de cet exploit, en montrant sans honte le site du crash :

Pas d’égratignures, à croire que le site d’atterrissage était prévu pour ça…

Que s’est-il mal passé ? Quelques minutes après l’essai, Elon Musk a indiqué sur Twitter que la pression dans un des réservoirs était trop faible, ce qui a causé la faible poussée lors de l’atterrissage.

En effet, comme le Starship est en position horizontale lors de sa chute, lorsque les moteurs doivent être ré-allumés, les moteurs ne peuvent pas tirer le carburant depuis les réservoirs principaux, car les tuyaux permettant de les drainer se trouvent en bas (car la fusée est verticale au décollage, et les moteurs sont en dessous).

Pour pallier à ce problème, SpaceX a décidé de créer des petits réservoirs annexes dédiés, restant remplis jusque l’atterrissage. Ces réservoirs sont utilisés pour ré-allumer les moteurs alors que la fusée est en position horizontale. 

Une faible pression dans le réservoir de méthane pourrais permettre aux flammes de remonter pour attaquer les injecteurs du moteur, en cuivre, ce qui pourrais être la cause des flammes vertes (et du manque de poussée, car il n’y avais pas assez de carburant à faire réagir avec l’oxygène).

Elon Musk, qui a réaffirmé la semaine dernière que 2026 était toujours la date cible pour le premier envoi d’équipages sur Mars, avec envoi de cargo en 2022 et 2024, était en tous cas très enthousiaste à l’issue de ce test, puisqu’il a déclaré :

Mars, here we come!!” (Mars, nous arrivons !!)

🚀🔴


Comment être déçu de la perte de SN8 quand on sait que le prochain prototype, SN9, a déjà un penchant pour prendre le relais au stand de tir ?

C’est une véritable usine de production à la chaîne que SpaceX construit.

Ils ont une mentalité différente que ce soit sur l’approche de développement, les ambitions, l’architecture mission, les technologies… Et pour le moment, ça a l’air de marcher. J’ai hâte de voir ce qu’ils vont faire ensuite, et il va vraiment falloir que je prévoie un petit voyage au Texas pour vivre ça en direct !

En bonus, cette vidéo postée par SpaceX sur Twitter. On y voit SUPER BIEN l’atterrissage et la raison du crash. Et, ce n’est pas du slow-mo. 🤯

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